Avril 2024


Trois questions à Antoine Sfeir

Antoine Sfeir
Antoine Sfeir est journaliste et politologue, directeur des Cahiers de l’Orient. Pour Jeune Dirigeant, il revient sur la question de l’immigration.

Jeune Dirigeant : Est-ce que l’on parle bien de l’immigration en France ?


Antoine Sfeir : On en parle différemment selon les familles politiques, mais nous manquons sur ce thème de consensus national. On entend tellement de bêtises et de contresens à ce sujet. Tout d’abord, l’immigration n’est pas linéaire ni uniforme. Nous avons besoin d’une immigration non qualifiée, provenant en majorité d’anciennes colonies françaises, et d’une immigration d’excellence, ouverte aux jeunes diplômés. Malgré la crise, ces personnes veulent encore venir chez nous. Outre le fait que nous ne pouvons pas fermer nos frontières, il y a du travail ici pour eux. Nous ne savons pas gérer la globalisation économique et financière et, surtout, nous n’avons pas voulu d’une globalisation citoyenne, celle des peuples.


JD. : Que pensez-vous de l’expression « immigration choisie » ?


A. S. : Elle me dérange, car elle sous-tend que l’on prend les « meilleurs » et on jette les autres. Un étudiant américain n’aura aucun problème pour venir passer un diplôme en France, ce qui ne sera pas le cas d’un étudiant venant du Sud.


JD. : L’immigration est-elle une chance pour notre pays ?


A. S. : Oui, c’est une chance. Ce qui pose problème, ce n’est pas l’immigration, c’est l’application des lois de la République. Il faut lutter contre toutes les formes de ségrégation. Car, nous avons besoin d’immigration pour faire tourner l’économie, mais aussi pour améliorer la qualité de la société. Comme disait Saint-Exupéry, « ta différence m’enrichit ». Il y a eu en France confusion entre intégration – impliquant la sauvegarde de ses racines – et assimilation, synonyme d’appauvrissement. La France n’est plus une terre d’asile, ni le pays des Droits de l’homme. Elle est devenue viscéralement individualiste, repliée sur elle-même. Pour retrouver une vision commune, une réflexion de grande ampleur est à mener.

La rédaction
Le 15-07-2014
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