Avril 2024


Les raisons d'être optimiste

En un siècle et demi, notre espérance de vie a crû de 4 décennies. Et la pauvreté recule à un rythme soutenu.

Les thèses des New Optimists sont relayées par plusieurs éditorialistes influents de la presse anglo-saxonne : Philip Collins du Times, c’est l’ancienne plume de Tony Blair et l’actuel président du think tank de centre gauche Demos ; Nicholas Kristof, éditorialiste au New York Times et deux fois Prix Pulitzer ; il est notamment l’auteur, avec son épouse Sheryl Wudunn du best-seller « La moitié du ciel », consacré au rôle des femmes dans les pays en développement. Ensemble, ils viennent de publier un nouvel essai, A Path Appears, voici qu’apparaît un chemin, recension de cas exemplaires à travers la planète de cas où un coup de pouce a permis à des individus de réaliser leurs objectifs ; citons aussi Brendan O’Neill qui publie à la fois dans The Spectator (britannique et conservateur) et sur le site Spiked (libertarien).

Sur quoi les New Optimists fondent-ils leur optimisme ? Sur toute une batterie de chiffres, démontrant qu’à l’échelle de la planète, nous vivons de mieux en mieux.

La pauvreté dans le monde recule à un rythme inespéré : chaque minute, 100 personnes en sortent. Contrairement à une idée reçue et colportée, l’extrême pauvreté dans le monde régresse. Les chiffres sont parlants : en 1981, 52 % des habitants des pays en développement survivaient avec moins d’un dollar par jour. Ils étaient encore 43 % en 1990. A cette date, deux milliards d’êtres humains disposaient de 1,25 dollar par jour – car ce montant avait été une première fois réajusté. En 2015, pour la première fois de l’histoire, le nombre de personnes vivant dans la pauvreté absolue – estimée désormais au-dessous d’un dollar 90 par jour, est tombé au-dessous d’un milliard. Il était estimé à 702 millions, soit moins de 10 % de la population mondiale, contre 29 % encore en 1999. En 25 ans, grâce à des programmes internationaux et à la croissance mondiale, 1 milliard 250 millions de personnes sont sorties de la pauvreté, alors même que l’humanité augmentait de 2 milliards d’individus. Bien sûr, nous ne sommes pas directement concernés : chez nous, cette pauvreté extrême a disparu depuis longtemps. Mais comment ne pas se réjouir des formidables taux de croissance qui, en Chine, en Inde et ailleurs, ont permis ces résultats ?

Autre donnée indiscutablement réjouissante : il y a 150 ans, l’espérance de vie d’un être humain était limitée à 30 ans. Elle a atteint, l’an dernier, les 70 ans. Voilà encore une cause d’optimisme ! Grâce aux progrès de la médecine et de l’hygiène, la mortalité infantile a fortement régressé et la vie s’est allongée de manière spectaculaire. Plus intéressant encore : c’est au cours des toutes dernières années que les progrès en ce domaine ont été les plus importants. L’espérance de vie, elle était inférieure à 60 ans dans le monde pour les deux sexes en 1970. Elle est aujourd’hui de 73 ans pour les femmes et de 69 pour les hommes. Mais le plus spectaculaire, c’est ce fait, souligné par l’OMS : nous avons gagné 5 années supplémentaires depuis l’an 2000 ! Loin de ralentir, la tendance s’accentue. Dans des pays africains, comme le Kenya ou l’Ouganda, on a gagné 10 ans de vie en dix ans.

Les causes de cette amélioration spectaculaire sont évidentes : des maladies comme la variole ou la peste bovine ont été éradiquées : en 1980 pour la première, 2011 pour la seconde. La malaria recule en Afrique. Plusieurs pays (dont la Chine, le Maroc et le Ghana) sont parvenus à éliminer complètement le trachome, cette maladie qui rendait aveugles des millions de personnes. La poliomyélite est officiellement éradiquée dans les deux Amériques, en Europe et en Chine. L’an dernier, le SIDA a tué deux fois moins de personnes qu’en 2005 et, pour la première fois dans l’histoire de cette maladie, une nouvelle thérapie dite « kick and kill » a permis d’éliminer toute trace du virus chez un patient. On vit beaucoup plus longtemps, parce que notre santé s’est améliorée de façon spectaculaire. Et, oui, l’humanité entière touche les dividendes des investissements réalisés dans la recherche et le développement médical et pharmaceutique.

Pourquoi alors, ce sentiment de déclin – que les Français ne sont pas les seuls à ressentir ? D’après Steven Pinker, célèbre psychologue américain, si nous ne percevons pas ces améliorations, alors qu’elles sont spectaculaires, c’est parce que nous basons nos raisonnements sur une information recueillie au jour le jour dans les médias. Or, ceux-ci, c’est bien établi, ne s’intéressent qu’aux avions qui s’écrasent ou disparaissent en mer. Pas aux 102 000 avions qui, chaque jour, en moyenne, prennent les airs, transportant quelque 8 millions et demi de passagers – soit un embarquement de 95 personnes chaque seconde quelque part sur la terre… Nous ne prenons pas suffisamment de distance pour apprécier les améliorations dont nous bénéficions comme les autres. Les New Optimists appellent à prendre du recul, à raisonner à partir de l’observation statistique et de manière tendancielle.

En outre, nous vivons dans une région du monde où l’essentiel de ces améliorations a déjà eu lieu. Nous sommes tellement habitués à ce que chaque jour nous apporte quelque bénéfique nouveauté, que nous prenons le mieux pour un acquis, un dû, alors que le moindre accident nous cause une énorme frustration.

Brice Couturier
Le 6-10-2017
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